Médiations artistiques et culturelles à l'hôpital

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Sollicité, Guy Atlan, vice-président de l’association Cerep-Phymentin et membre du Conseil Economique et Social pendant 12 ans a souhaité revenir sur son combat mené pour défendre l’importance des  médiations artistiques et culturelles dans les hôpitaux. Une conviction de longue date ayant donné naissance à un rapport en 2013, fruit d’un travail en collaboration avec la DRAC et l’ARS. Une approche indissociable des soins et des thérapies mises en œuvre depuis longtemps dans les établissements Cerep-Phymentin.

Culture et Santé : un projet qui vous est cher. Pourquoi ?

D’une façon générale, quand on a des enfants dans nos types d'établissements où il y a un projet thérapeutique, il y a bien sûr un projet pédagogique, mais il y a à côté de cela, quelque chose en plus, le projet culturel.

Les enfants que nous prenons en charge, sont, d’abord, dans leurs milieux familiaux, souvent privés d’une approche culturelle – lecture, musique – arts visuels, mais, c’est aussi un mode pour les sortir de leur pathologie. Les enfants que l’on soigne ont une carence symbolique. Il faut nécessairement des médiations pour que les émotions qui sont les leurs puissent se canaliser, vers autre chose – la danse, le théâtre, le chant. Leurs émotions prennent en définitive une autre expression.

Traduire les émotions

Pour moi, la beauté de la nature humaine, c’est d’avoir inventé l’art, la création artistique. Imaginons qu’entre vous et moi, il y ait une image. Vous avez une émotion, moi j’ai la mienne mais en définitive on va essayer de mettre des mots pour les faire correspondre. C’est la naissance du langage. A côté de l’émotion, on met autre chose pour pouvoir communiquer. C’est là le travail de nos établissements : permettre à l’émotion de se traduire par quelque chose d’autre : une image, une forme, une personne.

La médiation est cosubstantielle à l’idée de thérapie

Dans nos établissements, où que vous alliez, il y a des dessins, des poteries, du bruit, de la musique. Dès le début, au Cerep, nos amis Raymond Cahn et Denise Weill ont mis en place, en même temps que le soin et les thérapies, les médiations artistiques. C’était nécessairement, un mode d’approche des enfants, pour essayer de les faire sortir de leur mutisme. Le psychodrame, par exemple, est une bonne façon de faire sortir l’enfant de son monde, en mettant un objet à côté. 

Comment pourrait-on définir une médiation ?

La médiation, c’est faire naître quelque chose en dehors de la personne. Je ne fais pas de différence entre médiations artistiques, culturelles et thérapeutiques. Dans tous les cas, c’est « médier » et tout ceci est organisé dans l’idée d’un projet thérapeutique. Par ailleurs, faire une médiation, c’est créer une relation : on n’a pas besoin d’être thérapeute.

Je suis très favorable au nouveau dispositif DRAC/ARS. J’ai moi-même produit un rapport, en 2013, intitulé « Art et Santé : les animations artistiques en milieux de soins en Ile-de-France » dans le cadre du Conseil Economique, social et environnement régional d’Ile-de-France (CESER). J’avais rencontré alors Laetitia Mailho. Nous aurons ainsi l’écho de ce qui se fait ailleurs et que nous pourrons rediffuser dans nos établissements. »

Nous vous invitons à lire quelques extraits issus de la conclusion du rapport rédigé par Guy Atlan, en 2013, encourageant et annonçant à demi-mots la naissance du futur dispositif DRAC-ARS qui a vu le jour fin 2015.

« Tout le monde admet qu’introduire des animations artistiques dans les lieux de soins, surtout s’il s’agit de lieux où les patients séjournant pour une durée longue, mais pas seulement, est une évidence puisqu’elle conduit à ne pas s’adresser exclusivement à la personne physique mais à un quelqu’un qui a un univers mental, une personne totale, une personne totale et non morcelée en quelque sorte, et donc la prise en compte d’un « soin psychique » a autant de sens que le reste. D’où l’indispensable ouverture dans cette direction, la liberté étant laissée à la personne de s’en saisir ou non. C’est toute la problématique de l’humanisation des lieux de soins…

… Et cependant, …, cette évidence admise par un grand nombre de responsables d’administrations hospitalières ou de santé, et certes bien présente dans le discours qu’ils tiennent, prend souvent peu sens quand on se plonge dans la réalité. L’illustration de cela nous fut donnée par exemple par un des responsables de l’Administration Centrale de l’AP-HP, qui nous indiquait que cette question de la culture devait devenir centrale et s’inscrire au même titre que toutes les autres, comme l’un des volets à introduire dans le projet stratégique de l’établissement…encore faut-il se donner les moyens de soutenir une telle prise de position, qui ravit en soi, alors que dans le monde du quotidien, les moyens et personnels dévolus aux pratiques culturelles sont souvent les sources d’ajustement aux autres besoins, toujours admis plus urgents.

L’occasion d’un rapport est certes de dire les manques rencontrés dans ce qu’on estime souhaitable mais aussi, et surtout, d’indiquer la découverte de parcours qui soulèvent l’enthousiasme devant l’ingéniosité et le talent déployés par certains...souvent parce qu’il faut tout inventer : l’action des associations qui les mettent en œuvre, l’articulation souvent trouvée avec les responsables administratifs et les personnels soignants dont le rôle est déterminant s’ils en sont convaincus et disponibles, les relais disponibles à l’extérieur pour peu qu’on les cherche…bref un rapport stimulant à bien des égards… »