Newsletter TEMPO

24/11/2019

TEMPO – Newsletter associative de novembre 2019

Le travail avec le familles
Un livret sur le handicap psychique – handicap invisible en préparation.
Des planches illustrées et des informations simples pour décrire et expliquer les combats quotidiens menés par des parents : un travail réalisé par les associations APACEP et APACM en collaboration avec l’association

Un projet qui mobilise les énergies depuis plusieurs mois est né et construit – comme souvent au Cerep – de rencontres et d’échanges. Entre des parents dont les enfants sont accueillis dans ses différents hôpitaux de jour et des membres du Cerep actifs dans une instance qui porte la voix des parents : la CDU (Commission des usagers). Parce que tous ont constaté la difficulté d’expliquer et de faire comprendre à leur entourage ce qu’est ce handicap invisible, le handicap psychique de leurs enfants, nous avons décidé de réaliser un livret d’informations simples et justes qui serve de point d’appui pour les familles.

Ce livret, en cours de finalisation, rassemble des situations de la vie courante et les incompréhensions qu’elles peuvent susciter ; il les présente à partir de planches de dessins et de quelques phrases de texte significatives. Le recours à l’hôpital de jour, les ressources apportées par la diversité de ses intervenants, les moments de soutien individuel y sont largement détaillés.

Qu’est-ce alors que la CDU, cette Commission des usagers qui a été, pour nous, le creuset de ce document ?
Une instance créée et définie par la loi, donc obligatoire, fonctionnant dans les établissements sanitaires. Composée de médiateurs médecins et non médecins et de représentants des usagers sa « principale mission est de veiller au respect des droits des usagers et de faciliter leurs démarches afin qu’ils puissent exprimer leurs difficultés. » Elle est également « consultée et formule des avis sur la politique d’accueil et de prise en charge des personnes malades et de leurs proches… [et] peut proposer un projet des usagers. ». C’est de cette mission-là dont les associations de familles se sont saisies. Concrètement, au Cerep, nous avons choisi de mettre en avant les familles et les associations qu’elles ont constituées, de laisser la place à une parole vivante, débonnaire qui se croise et s’entrecroise plusieurs fois par an à l’occasion de « café chouquettes ». Là, dans les établissements, les mères et aussi les pères, parfois les jeunes frères et sœurs (et même les bébés) décrivent, interrogent. Nous nous écoutons entre nous car tous avons besoin d’entendre ces paroles. De là, de ces constats répétés : « Nous ne savons pas comment dire, comment faire comprendre aux autres, le handicap de notre enfant », est né ce projet. Littéralement porté par les familles et leurs associations, que nous avons rejointes dans la préparation puis l’élaboration.

Jusqu’ici un tel livret n’existait pas, nous avons bien cherché, mais il semble que personne n’avait eu la force et la détermination pour y parvenir.
Merci donc à ces parents qui ont pris le temps et montré l’ouverture d’esprit et la générosité qui ont construit ces pages. Et nous souhaitons une grande vie à ce livret, fruit d’un travail partagé. Ce livret est le fruit d’une longue élaboration : il verra le jour en 2020 !

Odile Naudin, présidente de la Commission des Usagers et administratrice de Cerep-Phymentin

TEMPO – Newsletter associative de novembre 2019

Éditorial

🖋 Chers lecteurs,

Quelle est la nature du travail avec les familles en institution et pourquoi le mot travail ? Du latin tripalum qui signifie instrument de torture, le mot aurait donc une connotation douloureuse. En est-il ainsi à l’USIS, un hôpital de jour où nous nous efforçons de transformer les liens, les modalités relationnelles auxquelles les enfants et leurs parents sont habitués ? Nous accueillons des enfants pour qui la violence et le passage à l’acte sont au premier plan.

Nous pourrions dire, pour résumer, que le but des soins est de transformer cette violence brute qui fait effraction en agressivité, de lui donner du sens et de trouver des significations aux passages à l’acte, en d’autres termes de construire une narrativité. Le travail avec les familles fait partie du projet de soins qui prend en compte la parentalité et ses transformations. Pour cela l’institution a développé, en plus de ceux destinés aux enfants, plusieurs espaces destinés aux parents, certains bien cadrés, d’autres plus informels. Donner une place à ces parents est un aspect du travail qui s’avère indispensable et incontournable.

À l’USIS, les parents sont impliqués dans la prise en charge de leur enfant par tous les membres de l’équipe présent, chacun à leur façon. Des rencontres pensées tout au long du parcours de soin dans l’institution, depuis l’accueil des parents lorsqu’ils accompagnent l’enfant, jusqu’aux entretiens plus formalisés. En effet, il faut, d’un côté, pouvoir prendre un temps pour échanger de manière informelle, savoir entendre la réalité de ce que les parents vivent, trouver la juste distance nécessaire à un apprivoisement réciproque pas toujours naturel ; de l’autre, il faut organiser des temps de rencontre plus structurés, programmés et réguliers. Donc, à côté des échanges, pris dans la dynamique des allées et venues des enfants, des entretiens plus formalisés ont lieu.

Au moment de l’admission à l’USIS les parents rencontrent la direction puis les deux soignants qui seront les référents de l’enfant tout au long de sa prise en charge. Ces derniers organiseront ensuite, de manière régulière, des entretiens avec les parents, qui permettent d’approfondir certains aspects de la vie de l’enfant pour tenter de transformer les modalités relationnelles souvent sources de difficultés et de souffrances autant pour l’enfant que pour la famille.

Ces différents espaces de rencontre vont permettre une approche la plus complète possible de l’enfant, à la fois de sa singularité, mais aussi du groupe famille auquel il appartient. Ils permettent également de moduler la distance à laquelle nous nous adressons à ces parents, souvent fragilisés par des événements de vie difficiles et douloureux. Ils ont souvent, depuis bien longtemps, mis en place des défenses qu’il s’agit d’abord de repérer et de respecter pour pouvoir, au fil du temps, les dénouer.

Ce travail de tissage des liens est indispensable à la création d’une alliance avec ces parents, elle-même indispensable à la conduite des soins de l’enfant. L’institution fait fonction d’enveloppe, de contenant où chacun des professionnels représente une partie de cette dernière qui porte cette fonction. Chacun participe à sa création et à son bon fonctionnement qui porte, et dans la réalité et psychiquement, à un niveau plus symbolique, l’enfant et sa famille. Ce travail n’est pas toujours possible et cette impossibilité conduit parfois à des arrêts de la prise en charge. Mais heureusement l’expérience nous a montré que, même dans les situations les plus compliquées et douloureuses, il y a toujours des « parties » de la parentalité qui sont préservées et sur lesquelles les soins peuvent s’appuyer pour accompagner au mieux l’enfant.

Alors oui, nous pouvons parler de travail, non pas au sens de la torture, mais au sens de l’effort, de la durée, de la persévérance et de la patience. Les enfants accueillis à l‘USIS ont pour habitude de fonctionner dans le « tout de suite », dans l’agir, souvent en miroir de leurs parents qui ont trop attendu, trop espéré et trop perdu. Alors, pouvoir déconstruire ces mécanismes pour tisser de nouveaux liens intrafamiliaux plus harmonieux et solides implique au moins le travail collectif d’une institution et des parents.

Sans dénier pour autant une souffrance qui accompagne forcément le soin, si l’on parle de travail psychothérapeutique c’est bien parce qu’il coûte, car l’énergie nécessaire au changement génère inévitablement angoisses et peurs, tant pour la famille, que pour l’enfant et les soignants. Le cadre institutionnel, par ses enveloppes et leurs effets contenants, tente d’en atténuer les impacts.

L’équipe de l’USIS

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